Madagascar : promouvoir la participation politique des femmes

A l’occasion d’une mission réalisée par CARE à Madagascar en mai dernier, une rencontre a eu lieu avec l’organisation FPFE (Fédération pour la Protection Féminine et Enfantine), soutenue par Féministes en Action. FPFE mène notamment un projet pour promouvoir la participation politique des femmes dans le pays. Entretien avec Céline Marie Yolande VIA, Coordinatrice nationale et Phostinah PAPISY, Responsable de suivi-évaluation de FPFE.

L’équipe de FPFE à Madagascar : Yolande, Phostinah et Katucia.

Pouvez-vous présenter votre association et ses missions ?

Yolande VIA : la Fédération pour la Promotion Féminine et Enfantine a été créé en 2007, puis s’est développée à l’échelle nationale en 2016. L’objectif initial était de fédérer les femmes qui se mobilisaient pour célébrer la Journée internationale des droits des femmes. Nous avons voulu monter un projet pour ces femmes afin de les aider à se développer humainement et économiquement.

En 2008, nous avons créé un centre d’écoute, de conseils juridiques et de prise en charge médicale et psychologique pour écouter et orienter les femmes victimes. En tant que juriste, ce projet m’a particulièrement intéressée car je voulais aider les femmes qui ne connaissent pas leurs droits.

Le programme de notre association repose sur quatre thématiques principales : l’Agenda Paix et Sécurité de l’ONU ; l’éducation et la justice économique ; l’environnement, le changement climatique et le développement durable, et la santé et les droits sexuels et reproductifs des femmes. Nous travaillons sur tout ce qui concerne les femmes. C’est à nous de le faire ! C’est à nous de nous occuper de notre corps, de notre éducation… Concernant l’accès à l’école notamment, les filles ne sont pas traitées à égalité avec les garçons. Il y a beaucoup de déscolarisation chez les filles, c’est pourquoi nous nous sommes mobilisées pour leur accès à l’éducation.

Quel appui a apporté Féministes en Action à votre association ?

Yolande VIA : La première subvention reçue, en 2022, nous a permis de redynamiser les membres de notre organisation au niveau régional. Avec le projet Féministes en Action, nous avons pu créer de nouvelles antennes régionales dans 15 régions. Cela nous a permis de mieux nous connaître et d’unir nos forces dans la lutte contre les violences basées sur le genre et pour la promotion des droits des enfants et des femmes.

Phostinah PAPISY : La deuxième subvention, attribuée en 2023, finance actuellement notre projet de plaidoyer sur la loi de participation des femmes aux postes de décision. Une première proposition de loi avait été adoptée par le Parlement, suite à la mobilisation d’associations malgaches dont la nôtre, mais elle a malheureusement été déclarée inconstitutionnelle par la la Haute Cour Constitutionnelle (HCC).

Nous avons décidé de persévérer. Nous voulons présenter à nouveau un projet de loi, avec des améliorations et des reformulations prenant en compte les commentaires de la HCC, et espérer que, cette fois, elle pourra être validée. Pour l’élaboration de cette nouvelle proposition de loi, nous travaillons avec des réseaux d’organisations de la société civile, des anthropologues, des sociologues, la gendarmerie, la police et des juristes constitutionnalistes. Nous collectons et compilons les propositions de toutes ces parties prenantes, afin d’intégrer les idées de tous et toutes, même celles de Madame et Monsieur Tout le monde. Puis nous allons présenter une ébauche de texte de loi aux constitutionnalistes pour une mise en forme juridique.

Une fois ce projet révisé par les constitutionnalistes, la FPFE va agir pour que cette loi soit présentée au Parlement, en espérant que, cette fois-ci, elle sera bien validée par la HCC.

Nous sommes assez optimistes, même si cela reste un défi compte tenu du contexte politique et économique à Madagascar. Quoi qu’il en soit, nous souhaitons que notre action aboutisse et que la loi ait un véritable impact au niveau des populations et des décisionnaires. Elle doit contribuer à un équilibre entre les droits et les obligations des hommes et des femmes.

Pour mémoire, Madagascar a ratifié un certain nombre de traités internationaux mais ce dont nous avons besoin, maintenant, ce sont des réalisations concrètes. Nous attendons de cette loi qu’elle ait des effets concrets : ce qui nous importe est l’amélioration des condition des femmes.

La loi est essentiellement centrée sur la participation des femmes aux sphères décisionnelles. Comment cette loi peut-elle contribuer à améliorer les conditions de vie des femmes ?

Phostinah PAPISY : Travailler à la promotion de la participation des femmes aux sphères politiques ou de responsabilité économique est une façon de lutter pour le respect des droits des femmes en général, et en particulier pour lutter contre les violences faites aux femmes. Qui connait les besoins des femmes si ce ne sont les femmes elles-mêmes ? Si nous, les femmes, ne sommes pas présentes dans les sphères de décisions, rien ne bouge. Il faut qu’on soit partout pour que ça bouge ! L’enjeu est que les femmes puissent atteindre leur plein potentiel. Il faut qu’on fasse entendre notre voix !