Au même titre qu’en Inde, les Dalits (« Intouchables ») au Bangladesh sont considérés comme des « sous-humains » ne méritant pas les mêmes droits que le reste de la population. Victimes de discrimination sociale, économique et politique, les Dalits ont un accès limité à l’éducation, à l’emploi et aux services de santé. Ces discriminations systémiques peuvent aussi se manifester par la violence, l’exclusion sociale et des pratiques d’exploitation.
C’est le cas pour toute la communauté Kaiputra, l’une des minorités ethniques du Bangladesh, qui vit principalement dans les régions du nord et du centre du pays. L’association Breaking the Silence se tient à leurs côtés pour défendre leurs droits et concentre son action sur les femmes et les filles.
La communauté des Kaiputra
Les Kaiputra sont une communauté du sud-ouest du Bangladesh particulièrement isolée, ostracisée, pauvre et socialement exclue. Traditionnellement, les Kaiputra dépendent de la pêche,de l’agriculture et de l’élevage, notamment des cochons. Dans un pays à majorité musulmane comme le Bangladesh, les cochons sont considérés comme impurs. Cette communauté nomade est particulièrement rejetée et victime de nombreuses discriminations liées à cette tradition : pauvreté, accès limité à l’éducation et à la santé, à l’emploi et à la vie politique.
La communauté Kaiputra, tout comme d’autres groupes ethniques, demande une meilleure reconnaissance de ses droits et une représentation accrue dans les instances politiques et sociales. Car, sans voix dans ces espaces, ses besoins et ses préoccupations ne sont pas pris en considération, voire niés.
La double stigmatisation des femmes et des filles
Les femmes et les filles de cette communauté subissent également des discriminations liées à leur genre qui s’ajoutent aux difficultés déjà rencontrées par leur communauté : elles vivent alors une double stigmatisation.
Les filles sont souvent forcées d’abandonner l’école pour des raisons économiques ou pour assumer des responsabilités domestiques, ou bien parce qu’elles sont mariées de force. Le Bangladesh est l’un des pays avec le taux de mariage forcé le plus élevé au monde. Les femmes de ces communautés sont particulièrement vulnérables à la violence domestique et à d’autres formes de violence de genre. Les préjugés et la stigmatisation rendent difficile la dénonciation de ces abus. Les femmes des communautés marginalisées sont sous-représentées dans les instances de décision, ce qui limite leur capacité à revendiquer leurs droits et à participer activement à la vie communautaire.
A lire : Bangladesh : Lutter contre le fléau des mariages d’enfants
L’action de Breaking the Silence
Breaking the Silence (BTS) est une organisation qui lutte contre les violences basées sur le genre et pour la promotion des droits des femmes et des filles. Elle s’efforce de sensibiliser le public sur les problèmes de violence domestique, de harcèlement et autres formes d’abus, tout en offrant un soutien aux victimes. L’association travaille particulièrement avec les communautés les plus marginalisées, comme les Kaiputra.
Grâce au financement de Féministes en Action, BTS a mis en place un mécanisme de soutien impliquant diverses parties prenantes afin de promouvoir la santé et les droits sexuels et reproductifs des filles et des femmes. Les dirigeants, les administrations locales, les cliniques communautaires, les établissements d’enseignement et les organisations communautaires ont été sensibilisés aux droits des femmes et des filles à travers des formations et des événements. L’association a créé des « camps de santé », en association avec des cliniques communautaires et avec des médecins qui fournissent des soins de santé et des conseils aux adolescentes.
Les filles et les femmes de la communauté ont été encouragées à dénoncer toute forme de violence et à demander réparation. Des comités de protection des droits des filles et des femmes ont été créés au sein de la communauté pour jouer un rôle de vigilance et apporter une réponse immédiate aux cas de violences rapportées. Le projet a également permis de développer le leadership des filles et des femmes dans la communauté et de persuader le gouvernement local d’inclure la communauté dans les prises de décisions afin de faciliter le dialogue social.
Comprendre le système de castes au Bangladesh : Les systèmes de castes sont le plus souvent associés à l’hindouisme mais, au Bangladesh, ces traditions et pratiques ont également été adoptées par la majorité de la population musulmane. La hiérarchie des castes de la religion hindoue considère les Dalits comme inférieurs et indignes. La situation des Dalits n’est pas strictement liée au système de castes tel qu’il est pratiqué en Inde, mais plutôt à des discriminations sociales et économiques, influencées par des traditions et des préjugés socio-culturels. Les Dalits sont traités comme des citoyen·nes de seconde zone et occupent des emplois peu reconnus voire dévalorisés tels que le nettoyage des rues, le traitement du cuir, l’élevage de porcs, la plantation de thé, ou bien la pêche. Les Dalits sont également victimes de discrimination en matière d’accès au logement et à la terre et sont confinés dans des bidonvilles insalubres. On estime à environ 5 millions le nombre de Dalits au Bangladesh. |